Alors que la dégradation rapide et massive des écosystèmes sous l’influence des activités humaines est désormais un phénomène avéré et de plus en plus médiatisé, fleurissent les discours tentant de qualifier cette époque proprement « catastrophique » que nous sommes en train de vivre. Points de bascule, limites planétaires, anthropocène, mais aussi capitalocène, effondrement, catastrophisme éclairé, récits dystopiques ou protopistes, mouvements cyberpunk, solarpunk, etc. : les termes et narratifs hérités des sciences comme des contenus fictionnels ne manquent pas pour tenter de qualifier les dynamiques en cours nous conduisant vers un futur vertigineux si ce n’est apocalyptique. D’aucuns et d’aucunes décrivent cette période à l’aune de cet événement qui a commencé à avoir lieu et bouleverse les visions du monde, les pratiques et décisions politiques. « L’intrusion de Gaïa(note: Se référer à ce titre en particulier aux travaux de LATOUR, Bruno ; LOVELOCK, James ; MARGULIS, Lynn ; et STENGERS, Isabelle.) » induite par la prise de conscience de la catastrophe écologique est alors perçue comme le phénomène moderne par excellence, qui caractérise notre époque et la singularise à l’échelle de l’histoire de l’humanité. D’autres, au contraire, s’attachent à rappeler l’héritage qui alimente et nourrit l’imaginaire contemporain de la catastrophe écologique. Car, de fait, la fin du monde n’a certainement pas davantage constitué un impensé hier qu’aujourd’hui, si l’on se réfère du moins aux théories catastrophistes d’inspiration religieuse ou philosophique qui ont traversé les siècl…
L’Entropocène : pour une anthropologie de la catastrophe planétaire
En s’appuyant sur Lévi-strauss, Inès Saragosa propose la catégorie d’Entropocène (entropie/anthropocène) pour “enrichir la réflexion sur la catastrophe écologique actuelle” d’une approche structurale comparant les différents discours sur les fins du monde, imaginées et vécues.