Irréversibilité : quel cours de l’histoire, s’il y en a un ?

L’impact sans cesse croissant de l’action humaine sur la planète nous pousse à penser de moins en moins en termes d’horizons ouverts du futur, et de plus en plus en termes de temps qui restent pour changer le cours de l’histoire et éviter les catastrophes. Trois essais récents, parus en Allemagne, en philosophie sociale et en sociologie du progrès et du changement climatique, invitent à un débat sur le cours de l’histoire et ses éventuels tournants récents. La catastrophe était-elle, est-elle, inévitable? À quoi tient le changement social?

Les connaissances accumulées sur la transformation de la planète Terre par le changement climatique, l’extraction des ressources et la dégradation de l’environnement suggèrent que l’humanité et la planète qu’elle habite étaient entrées irréversiblement dans une nouvelle ère. Le terme d’Anthropocène, inventé par les géologues, est censé donner un nom à cette nouvelle ère. Le fait qu’il soit rapidement entré dans le débat public manifeste peut-être non seulement la nouvelle condition planétaire, mais aussi le désir – ou même le besoin – de se situer à nouveau dans le temps historique.

Mais le débat qui a suivi a aussi montré combien il est difficile de cerner les contours du temps nouveau, voire de déterminer si nous vivons dans un temps nouveau. La question du changement d'époque est constitutive des Temps qui restent, et, dans son premier numéro, de nombreuses contributions au dossier « Hériter des temps modernes » l'ont abordée sous des angles variés. Faisant suite à ce premier dossier, cet article explore dans quel sens les temps qui restent forment une nouvelle époque et si l'humanité est entrée dans cette époque irréversiblement. Il le fera en examinant trois ouvrages récents, en langue allemande, de philosophie sociale et de sociologie, qui, malgré leur diversité, partagent d'une certaine manière le souci de comprendre notre époque actuelle, même si seulement deux d'entre eux se concentrent sur l'urgence écologique.

À la recherche du progrès perdu (Rahel Jaeggi)…

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