Une étoile, un décor en trompe-l’œil, un oiseau vivant sont-ils des documents ? Non. On appelle documents des catalogues d’étoiles, les trophées d’un cabinet de curiosité, des oiseaux exposés dans un musée.
Nouveau Manuel de l’oiseleur a été réalisé en 2017 à Marseille dans les réserves du musée des Civilisations de l’Europe et de la Méditerranée (Mucem) pour une exposition intitulée «Document bilingue» qui se proposait d’interroger le statut ontologique des collections, divisé entre leur caractère ethnographique et leur dimension esthétique.
Au cours des repérages, l’exploration systématique des réserves s’accompagna d’un sentiment poignant de finitude qui excédait la nostalgie inhérente aux traces du passé. Sur ces étagères encombrées d’objets et ces claies à perte de vue transparaissait à la lumière des néons la prescience, soudain tangible, de la sixième extinction par la présence récurrente de l’oiseau, allégorie possible du document : jouets, sifflets, découpes d’ombres chinoises, papiers découpés, plumes, marionnettes, serinette ou appeaux. Ce n’était pas seulement le monde rural, si présent dans les collections, qui s’effaçait sous nos yeux, mais le souvenir encore récent de la présence des animaux à nos côtés. Le musée s’était transformé en miroir aux alouettes.
Nouveau Manuel de l’oiseleur est aussi un hommage au cinéma fantastique de Georges Franju, l’un des rares cinéastes à avoir interrogé la cause animale à l’aune de l’extermination, passée ou à venir, dans son terrible Sang des bêtes (1949) ou son bouleversant Mon chien (1955).
Cette enquête poétique fut l’amorce du film documentaire, Langue des oiseaux, réalisé en 2021, consacré à la traduction du chant des oiseaux et aux communications possibles entre les espèces. Langue des oiseaux est disponible en ligne jusqu’au 3 janvier 2025 sur la plateforme Arte TV.