La rubrique Propositions accueille des contributions qui ne sont ni des interventions dans le champ de l’actualité, ni des études contribuant à des champs d’expertise spécialisés, qui même peuvent n’avoir aucun objet à proprement parler et ne pas se trouver, par rapport à la question de l’héritage des temps modernes, dans un rapport thématique évident, mais qui semblent néanmoins proposer quelque chose qui nous semble aider à accomplir cet atterrissage de la modernité qui constitue l’enjeu du présent, fût-ce très indirectement. Il peut s’agir, par exemple, de textes littéraires, d’œuvres visuelles ou sonores, de systèmes philosophiques, de nouvelles théories scientifiques, d’innovations technologiques intéressantes en elles-mêmes ou pertinentes indirectement pour aborder le présent
Où elle est
Comment faire des violences, celles que l’on subit comme celles dont on est responsable, la matière d’un poème. Comment les donner à entendre et à sentir sans adopter une position de surplomb. C’est tout l’objet de « Où elle est » de Frédérique Cosnier. Derrière la formule incantatoire de l’indignation, nécessaire mais souvent simplificatrice, elle expose les cacophonies de la violence ordinaire, de l’intime au collectif, du « je » témoin et potentiellement agent au « nous » introuvable mais inlassablement convoqué. En accueillant la pluralité des voix et la continuité parfois contradictoire de leurs paroles, elle répond à la question que posait Ghérasim Luca à la langue du poème (qui est tout sauf intransitive) : « comment s’en sortir sans sortir ».
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Que signifie « non » dans « non-violence » ?
Qu’est-ce que la non-violence ? Pour répondre à cette question, Frédéric Neyrat interroge le sens du « non » qui la constitue, et propose l’idée suivante : la « non »-violence n’est pas opposée à la violence, mais au monde dans lequel une violence injustifiable s’exerce. Ainsi comprise, la « non »-violence n’est pas un moyen, mais une puissance collective révolutionnaire sans laquelle il n’est nul futur.
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Écopoétique du poème intéressant. Rapport au Schmilblick
Dans le nouvel épisode de ses Poésies à Problèmes, Pierre Vinclair revient sur la relation que ses chroniques, sans le dire explicitement, entretiennent à une des questions qui occupe Les Temps qui restent (et qui était l’objet de son premier dossier) : « Que devrait être (ou que devrait faire) la poésie pour hériter des temps modernes ? ». Et parce qu’il est illusoire de décréter ce qu’il faudrait faire, par exemple de l’écopoésie, il propose que nous nous attachions d’abord à « décrire notre sol », celui sur et dans lequel s’exerce la pratique poétique et qui est inséparable des circonstances, destinataires et intérêts du moment : plus que d’une écopoésie, c’est d’une écopoétique dont on aurait besoin.
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Comment défaire un destin – fragment fol
« Comment défaire un destin – fragment fol » est une expérimentation à la croisée de la poésie et des écritures du réel qui donne à un cas clinique rapporté par un psychiatre un autre destin que celui qui lui est fait dans le texte initial (Leçons cliniques sur la démence précoce et la psychose maniaco-dépressive du psychiatre allemand Emil Kraepelin, 1856-1926). Ni reproduction d’un délire, ni traduction poétique de théories psychanalytiques ou psychopathologiques, ni non plus montage d’archives psychiatriques, le geste de réécriture et de déplacement poétique que propose Coline Fournout tente de faire glisser la folie en dehors d’une grille de lecture exclusivement clinique.
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Être juif au Brésil : un récit personnel
Julien Pallotta traduit ici pour les TQR un texte subjectif et acide du philosophe juif brésilien Peter Pál Pelbart. Rédigé avant le 7 octobre 2023, il décrit la droitisation d’une part significative de la communauté juive à São Paulo, la façon dont elle oublie sa dimension minoritaire et la solidarité qui la liait naguère aux autres minorités, sa complaisance vis-à-vis du bolsonarisme et le malaise des Juifs de gauche face à cette dynamique que les événements de l’année écoulée n’ont fait qu’accentuer.
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La Covid-19 exposée comme pandémie et comme zoonose
L’épisode de la Covid fut un événement politique majeur. Mais sa signification reste énigmatique: annonce-t-elle un nouveau totalitarisme? faut-il l’interpréter comme la revanche de la nature contre une civilisation qui la maltraite? est-elle un simple épiphénomène dans la gestion «biopolitique» des populations? L’anthropologue et philosophe Frédéric Keck aborde ces questions dans un livre majeur, Politique des zoonoses, qui sort ces jours-ci à La Découverte. Nous publions ici, en bonnes feuilles, «l’ouverture» de son ouvrage. Il y imagine une exposition à venir résumant pour une société future cet événement énigmatique. Huit vitrines venues du futur pour nous rappeler à ce passé encore brûlant, et un présent fait de liens avec des objets techniques et des animaux.
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Digital Dummies
Cette nouvelle livraison de “Poésie commune” est véritablement commune : elle réunit une poétesse et un poète qui n’ont pas écrit ensemble, qui n’appartiennent pas à la même génération mais qui cependant font à la poésie quelque chose de comparable: leurs textes vont chercher la poésie dans les flux constants de l’audiovisuel le plus ordinaire qui médiatisent nos réalités politiques et vécues. En les réunissant, on espère faire sentir cet ancrage commun. Tel Jim Carrey dans The Mask confrontant la plasticité de son corps à celle des effets spéciaux numériques, Elsa Boyer et Patrice Blouin exercent et mettent en balance leur (in)capacité de synthèse au miroir des intelligences artificielles. Ce faisant, ils produisent une forme nouvelle de littérature digitale.
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Chroniques de la vie mutilée #2
Deuxième série des «Chroniques de la vie mutilée» de Pierre Schwarzer, où l’auteur s’intéresse au confort de la catastrophe, aux errances du débat public, au délabrement de l’âge à la tête de la première puissance mondiale et à ce qu’il reste des noms propres.
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Plastic amalgam
« Le travail du poème consiste à juxtaposer des fragments qui a priori n’ont pas de rapport. » Pour son quatrième épisode, Poésie à problèmes se penche sur un poème qui multiplie les larsens sans être pour autant bruitiste. Alice Notley – la poétesse (78 ans, « l’une des poétesses les plus célèbres et célébrées des USA ») – a beau dire ne pas s’intéresser à la traduction, traduire oblige à comprendre même (et surtout) quand il n’y a rien à comprendre.
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Politiques de la littérature : la littérature embarquée
Parmi les publications récentes consacrées à la dimension politique de la littérature, l’essai de Justine Huppe se distingue à la fois par son parti pris pragmatiste, et par son corpus (des œuvres expérimentales, principalement publiées dans les années 2000 en France). Plutôt qu’aux grandes déclarations révolutionnaires, La littérature embarquée s’intéresse à « la pratique littéraire comme intervention rabat-joie, grippant et dévoilant le fonctionnement des circuits de la littérature-marchandise », comme l’écrit Alexandru Matrei dans sa critique. Tout en ressaisissant les enjeux de cet essai original, il le replace dans l’horizon d’une réception internationale des ouvrages de théorie littéraire française.
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une idylle partielle
« une idylle partielle » est la fin d’un conte dystopique, mélusine reloaded (éditions Corti). Fabriquant à partir des ‘restes’ des récits du Moyen Âge des images dialectiques, Laure Gauthier fait revenir la fée mélusine dans des paysages désenchantés, un monde post-démocratique, multipollué et envahi de « Touristes Traversants » (TT) dont la langue, dévoyée, regorge d’acronymes. « une idylle partielle » est le moment où la fée, loin de s’échapper par les airs, au moment où son animalité est découverte, accepte de rentrer dans le temps de l’Histoire, de vieillir donc. Ce long poème en prose transforme la tradition de l’idylle pour imposer une éthique de la fragilité : il ne s’agit pas là d’une faiblesse mais d’une conscience de l’état du monde humain et naturel : « L’apocalypse est un nom qu’il ne faudrait pas employer. Mélusine en propose un autre : un présent encore. C’est un chant suffisant. » Extrait accompagné d’une capsule sonore avec la voix de Laure Gauthier et la musique d’Oliver Mellano.
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Entre les archives de Naples :
l’événement du gribouillage
l’événement du gribouillage
Dans la deuxième chronique de sa série, Francis Haselden se penche sur les archives bancaires de la ville de Naples où se cachent des images inattendues. Des centaines de gribouillages surgissent des volumes épais dans lesquels les comptables notèrent entre les XVIIe et XIXe siècles les prêts octroyés. Hommes qui défèquent, oiseaux qui tourbillonnent, formes abstraites, autant d’événements graphiques qui interrompent la temporalité de la dette.
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L’école de Trifouilly-les-Oies
« Que peut-on espérer du poème, c’est-à-dire d’un travail (nourri d’échanges) de la forme contre le contenu (enrichi d’expériences et de lectures), c’est-à-dire d’une dramatisation des problèmes qui, certainement, ne “change pas la vie” à elle toute seule et, qui plus est, leur ajoute une sorte de crise dans la signification ? » Pour sa troisième chronique sur la poésie contemporaine, Pierre Vinclair lit et relit un poème du poète et romancier américain Ben Lerner. Un poème qui, sous ses faux airs de facilité formelle, s’avère grand pourvoyeur de drame, de pensée et de vie – ou comment repenser l’engagement poétique et ses relations contrariées à la référence.
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Tolstoï au mois d’août
Relire La Guerre et la Paix pendant la « trêve estivale », pourquoi ? Peut-être, comme le suggère Frédéric Neyrat, pour nous souvenir de la vérité exprimée par Tolstoï : « La guerre c’est la guerre, ce n’est pas un jouet. Le but, c’est le meurtre ; les moyens : l’espionnage, la trahison, la ruine des habitants », et pour ainsi mieux résister aux slogans martiaux de nos politiques (« nous sommes en guerre », « réarmement démographique », « économie de guerre »…).
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Herr Gröttrup s’assied
Fiction littéraire d’une grande originalité, mêlant ironie et humour, Herr Gröttrup setzt sich hin de l’autrice, essayiste et militante britannique Sharon Dodua Otoo raconte l’histoire de Herr Gröttrup, de son épouse et d’un œuf. La traduction de cette nouvelle primée a été réalisée dans le cadre du festival littéraire international Mixed Zone qui s’est tenu à l’Université de Liège en 2017.
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Poétique du nichoir
«Parce qu’il a une forme, le poème existe. Jamais assez, bien sûr, pour accueillir une hirondelle réelle ; il ne saura se constituer que comme un nichoir symbolique.» Pour sa deuxième chronique sur la poésie contemporaine, Pierre Vinclair médite sur la manière dont les oiseaux peuvent continuer à habiter les poèmes alors qu’ils disparaissent de la terre : il faut pour cela cesser de les traiter comme des supports allégoriques.
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« Plus vite, plus haut, plus fort » : les Jeux olympiques sont-ils un culte de la performance ?
Les Jeux olympiques nous donnent à voir des athlètes qui s’acharnent à gagner quelques secondes ou quelques centimètres. Ne faut-il pas être singulièrement aliéné·e pour faire tant d’efforts pour si peu ? Contre cette critique du sport, Mathieu Watrelot propose ici une réflexion philosophique sur les possibilités d’expériences qu’offre la performance sportive.
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Géo-lithographie du temps suspendu
« Géo-lithographie du temps suspendu » n’est pas un essai, mais un poème. Ce poème est la trace d’une quête : chercher ce qui se cache derrière cette silhouette grelottante, un peu décharnée, qu’on nomme « j ». j est un être sans forme, il n’appartient à aucun règne – humain, animal, végétal, minéral – mais emprunte un peu à chacun, ne serait-ce que pour se donner des contours un tant soit peu saisissables. Il évolue au gré des routes et des métamorphoses, « Géo-lithographie du temps suspendu » en est comme l’ombre projetée sur le flanc d’une montagne.
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Remembrements
Le remembrement agricole est un moment marquant de l’histoire de l’agriculture et de l’environnement. En France, dans les années 1960, la restructuration du parcellaire rural a été massive afin de permettre la révolution agricole et la production intensive. Remembrement(s), récit en cours d’écriture dans le cadre d’une thèse en création littéraire, retrace, à partir d’archives et de témoignages, l’histoire de cette période dans la commune de Bazoges-en-Pareds, située au sud de la Vendée. Extrait.
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Poudreuse (extrait)
Dans un rapport étroit à l’oralité, par la polyphonie de répliques poétiques entrechoquées, Poudreuse est un texte qui laisse émerger l’espoir du collectif au milieu des décombres d’un système économique et politique. Les « solistes » du libéralisme sont là, pris en embuscade par la langue qui débusque leurs mobiles, leurs manies, leurs tactiques. Et la neige, à la manière du temps qui passe, imperturbable dans sa chute et implacable dans sa manière de recouvrir le réel, vient traverser cette chronique imparfaite, à l’impératif hors mode, demandant au temps de l’écrire.
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Les spaghettis, ou les temps comme imbroglio
Peut-on penser le temps comme un plat de spaghettis ? Vanessa Morisset rend hommage à cette étrange métaphore formulée par Bruno Latour à propos du futurisme italien, en explorant les paradoxes temporels de ce plat hautement réconfortant.
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Chroniques de la vie mutilée #1
Première série des «Chroniques de la vie mutilée» de Pierre Schwarzer. Inspirés des Minima Moralia d’Adorno, ces petits textes tragico-comiques pistent la vie au-delà des maux.
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Claude Lévi-Strauss et la ville du futur : New York pré- et post-moderne
Écologie des formes contraintes
« Quelque chose a changé : nous pouvons désormais écrire, publier, être traduite et célébrée pour un ensemble de dizains de décasyllabes à propos d’un fleuve. » Dans sa première chronique de « Poésie à problèmes », Pierre Vinclair propose sa lecture des Cubes danubiens de Zsuzsanna Gahse. Un hommage à la fondamentale étrangeté du monde.
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Gribouiller ici et maintenant: les “Subway Drawings” de William Anastasi
Pour la première de ses chroniques autour du gribouillage, Francis Haselden décrit et analyse la pratique singulière de William Anastasi qui propose, avec les Subway Drawings, une série d’images gribouillées dans le métro new-yorkais. Une “pratique créative qui ancre l’image dans le hic et nunc du geste”.
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Vues de Liège #1
Ici, on renoue avec l’esthétique de la pérégrination fragmentaire. Première série de la chronique «Vues de Liège» de François Provenzano, Grégory Cormann et Jeremy Hamers.
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L’Entropocène : pour une anthropologie de la catastrophe planétaire
En s’appuyant sur Lévi-strauss, Inès Saragosa propose la catégorie d’Entropocène (entropie/anthropocène) pour “enrichir la réflexion sur la catastrophe écologique actuelle” d’une approche structurale comparant les différents discours sur les fins du monde, imaginées et vécues.
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Théorie des territoires
Nos territoires ne sont pas de simples étendues spatiales, objets exclusifs de géographes solitaires. Auteur du livre Animated Land, coécrit avec Mattiäs Kärrholm, Andréa Mubi Brighenti élabore une territoriologie qui cherche à en montrer toute la complexité, à la fois sociologique, économique, éthologique, écologique, etc. Il nous propose, dans cet article, de partir à l’aventure dans ces territoires vivants, entreprises de coexistence sociale toujours renouvelées.
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Java marxienne
Dans ce premier épisode de la chronique des «chansons vertes et rouges pour les temps qui restent», Michel Arbatz partage une chanson qu’il a écrite jadis, à l’occasion de sa rencontre avec un dissident soviétique alors qu’il était militant révolutionnaire.
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La mise en abyme du Titan
Terme polymorphe qui désigne le vide psychique et les profondeurs insondables de la langue, l’abysse a trouvé sa propre structure implosée de mise en abyme sous la forme d’un submersible à la recherche de gratifications « titanesques », emportant son équipage d’investisseurs capitalistes sous la surface de Gaïa jusqu’au lit de mort de Poséidon.
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